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Comment Gérer les Blessures

Aurélien Zachwalinski

La musculation est l'un des sports les plus sûrs qui existe, mais cela ne s'empêche que l'on puisse se blesser, à la salle ou ailleurs! Que faire dans ces cas-là?

Quand le docteur nous dit de ne plus rien faire pendant une durée qui paraît incommensurablement longue, on hoche la tête d'approbation, mais en faisant certainement un doigt d'honneur mental.

Bien sûr, il y a des cas où un repos complet est d'ordre, mais la plupart d'entre nous décident de quand-même se bouger, à tort ou à raison, et de s'entraîner.

J'ai eu tout un tas de blessures plus ou moins légères au football américain, 3 opérations des genoux, 2 aux poignets, et devinez quoi: la seule fois où j'ai cessé de m'entraîner et suivi à la lettre les consignes du docteur, et bien je n'ai jamais vraiment récupéré.

Alors, je ne me prétends pas docteur, et chaque situation est différente, mais nous allons voir si on peut s'entraîner quand on est blessé, pourquoi, et comment le faire de la meilleure manière.


La récupération est votre responsabilité

La chose la plus importante lorsque l'on est blessé est d'avoir le bon état d'esprit. On a deux options:

  1. Se rouler en boule, pleurnicher et se plaindre.
  2. Essayer de tirer le meilleur parti d'une mauvaise situation et corriger ses faiblesses.

Je suggère l'option 2 si vous voulez avoir le plus de chances de succès. N'allez pas croire que les docteurs vont vous guider tout le long de la marche à suivre pour récupérer le mieux possible. Ils n'ont tout simplement pas le temps, et ce n'est pas leur métier.

Pour ma dernière opération je n'ai même pas de kinésithérapie! C'est à moi de me débrouiller, après un entretien de 5 minutes avec un kiné. Et beaucoup de personnes vont effectuer de la kinésithérapie de mauvaise grâce, n'écoute pas leur thérapeute et travaillent à moitié: il n'ont pas compris que rien n'était plus important que la santé!

Au final, bien récupérer est votre responsabilité, le thérapeute ne peut que vous guider.


Les principes de la récupération

Notre système immunitaire est lié intimement à la réponse du corps à l'exercice physique. Lorsque l'on soulève lourd ou effectue un entraînement cardio, des dégâts cellulaire se passent, et ces derniers vont entraîner une cascade de réponses physiologiques qui vont nous rendre plus fort, musclé, endurant et rapide.

Cependant, une blessure qui cause un stress important sur le système immunitaire va diminuer notre capacité à encaisser et récupérer d'un entraînement. Il va donc falloir modifier notre entraînement le temps que l'on aille mieux.

Le mouvement est nutrition. Lorsque l'on abîme un tissu mou (muscle, tendon, ligament), le mouvement est notre meilleur ami. Pourquoi? Le mouvement va accroître le débit sanguin sur cette zone et y apporter des nutriments et éliminer des déchets résiduels.

Tant que l'on ne fait pas n'importe quoi et que l'on reste dans les amplitudes et charges conseillées par notre docteur, bouger va rendre à notre corps un super service!

L'on s'en est déjà aperçu en 1995 lors d'une étude sur des rats: après les avoir blessé aux ischios, les scientifiques les ont divisé en 5 groupes:

• Un groupe est resté inactif.

• Deux groupes sont retournés à une activité physique après 72 heures, l'un à la nage, l'autre la course.

• Les deux derniers sont également retournés à ces activités, mais après une heure seulement.

Résultat? Les rats qui ont pratiqués une activité physique ont récupéré bien plus vite, et ceux qui n'ont attendu qu'une heure encore plus. Surprise: la course était plus efficace que la nage! il ne faut donc pas avoir peur de bouger le membre lésé, dans une certaine mesure bien sûr.

Et ce genre d'effet a été observé maintes fois chez des humains par la suite.

Évidemment, le niveau d'activité est à adapter en fonction du type de blessure, du niveau de chacun, et il ne faut pas trop en faire non plus par risque d'aggravation.

Ensuite, les variables hors de l'activité physique seront également à améliorer le mieux possible afin de guérir le plus vite et dans les meilleures conditions. Il sera donc important d'adopter une alimentation équilibrée, riche en protéines de qualité, fruits et légumes, de boire beaucoup d'eau, dormir correctement, éviter le stress et ne pas boire d'alcool.

Tous ces éléments participent à diminuer l'inflammation systémique (globale) du corps. Notre zone blessée est déjà en état d'inflammation, pas la peine d'en rajouter dessus!

Dans la même optique: pensez à travailler votre cardio! Avoir un meilleur système cardio-vasculaire va également contribuer à une récupération plus rapide.


Comment procéder: les blessures légères

Il se peut que vous n'ayez qu'une blessure légère comme une contusion, une tendinite ou une élongation. Dans ce cas vous pouvez bouger le membre et l'entraîner.

Une méthode courante est de tout simplement utiliser moins de poids. Une étude a ainsi voulu mesurer l'efficacité de l'entraînement avec des charges à 50% de son maximum. Pendant 12 semaines, les scientifiques ont fait s'entraîner 3 groupes:

• Un groupe faisait des séries de 8 avec 3 secondes d'excentrique et 3 secondes de concentrique à 50% de leur 1RM.

• Un groupe faisait des séries de 8 normales à 80% de leur 1RM.

• Un groupe faisait des séries de 8 normales à 50% de leur 1RM.

Après les 12 semaines, le premier groupe avait augmenté leur force de 28%, le second de 32% et le troisième de 16%. Moralité: on peut très bien progresser avec des charges plus légères!

Diminuer vos charges jusque 50% de votre 1RM est donc une bonne option, et vous avez plusieurs manières de rendre cette charge effective:

• Ne prendre que 30 secondes de repos entre les séries et en faire plus afin de les rendre de plus en plus difficiles suite à la récupération partielle.

• Aller à l'échec total sur chaque série.

• Utiliser un tempo lent comme le 3030 de l'expérience ci-dessus, ou bien un excentrique uniquement lent de 3-6 secondes, ou bien incorporer une ou plusieurs pauses de 2 à 3 secondes durant le mouvement. Notez qu'un excentrique lent sera particulièrement efficace en cas de dommages aux tendons et ligaments comme une tendinite.

Une autre option va être d'utiliser une résistance variable, ce qui peut être très efficace si l'on est blessé à certains endroits comme l'épaules ou le genou.

En utilisant des élastiques, des élastiques inversés ou des chaînes, on va diminuer le poids sur la partie la plus risquée de l'exercice, là où notre membre est le plus faible, tout en l'augmentant sur la portion la plus simple.

Par exemple, utiliser des chaînes ou des bandes sur un développé couché va diminuer la charge près du torse, et la rendre plus lourde en fin de mouvement: c'est excellent si on a un problème aux pectoraux ou aux épaules.

La technique des bandes inversées est ma favorites en cas de blessure, la voici ici sur le hack squat, une version incroyablement douce pour les genoux, que je recommande vivement (ainsi que le squat normal avec bandes inversées):

Et vous pouvez très bien combiner des bandes avec un tempo lent pour encore plus de souffrance et une charge encore plus allégée!


Comment procéder: les blessures graves

Il se peut que vous ayez une blessure plus importante qui vous empêche tout simplement d'entraîner la zone cible. Pas de panique! Vous pouvez quand-même y remédier.

Une excellente manière de stimuler un membre blessé sans l’aggraver est la technique de Cross Education ("éducation croisée"). Si vous avez un membre inutilisable, comme par exemple le bras gauche, il suffit simplement de continuer à entraîner le bras droit!

Lorsque que vous allez travailler le bras droit, le cerveau va envoyer un signal électrique le long de la moelle épinière jusqu'au bras droit... Mais également au bras gauche! Ce phénomène est appelé intégration neurale de coordination inter-membraire.

Une étude a ainsi mesurée qu'après 12 semaines de travail sur la jambe droite, la jambe gauche était bien plus forte que chez les personnes n'ayant rien fait. À noter, l'excentrique était particulièrement efficace, donc veillez à le maîtriser sur au moins 2 secondes.

Et ne vous inquiétez pas, vous ne serez pas tordu avec un côté bien plus musclé que l'autre! Cette différence s'effacera très vite après un retour à l'entraînement du membre blessé. Par exemple Greg Doucette continuait de marteler son côté gauche après s'être cassé le coude droit.

De plus, il vous reste le reste du corps à entraîner. Le principe de stimulation nerveuse va s'appliquer également.

C'est simple: si vous avez un membre blessé, entraînez l'autre avec des exercices unilatéraux (par exemple, j'ai une cheville foulée, je peux faire du soulevé de terre roumain à une jambe de l'autre côté) et le reste du corps.

Certaines blessures, comme le bas du dos, les hanches et l'abdomen sont plus embêtantes, mais dans ce cas l'on peut toujours s'entraîner en utilisant des machines ou des exercices qui ne mettent pas de stress sur l'abdomen (par exemple du floor press au lieu du développé couché, et du rowing planche au lieu du rowing buste penché).


Mes recommandations:

1) Stade initial: celui-ci peut durer plusieurs jours à plusieurs mois en fonction de la gravité de la situation. Ici, la priorité est d'aider à la récupération autant que possible.

• Faites du cardio 2-3 fois par semaine.

• Bougez chaque jour (squat, charnière de hanche, tirage, poussée), mais en gardant le volume et l'intensité basse.

• Concentrez-vous sur vos faiblesses.

• Ayez une alimentation propre. Un microbiome en bonne santé contribue au sommeil, à l'inflammation et à votre récupération.

• Massez et mobilisez la zone blessée et celle juste autours tous les jours.

• Dormez beaucoup.

• Bougez beaucoup (allez faire des marches!)

• Pas d'entraînement trop difficile.

2) Le stade secondaire: plus de médocs, et on peut attaquer une rééducation plus agressive. La réponse hormonale du corps à l'exercice aidera à la récupération. Pratiquez du cardio tous vos jours "off".

• Alternez entre jours difficiles et faciles.

• Les jours faciles devraient surtout être de l'aérobie et du travail léger.

• Vous ne devriez pas trop vous fatiguer sur le long de la semaine et vous sentir presque à 100% avant chaque séance difficile.

3) Le stade final: c'est la transition avec le retour à l'activité normale. C'est la plus frustrante car on aimerait être au même niveau qu'avant la blessure!

• Soyez patients sur vos charges et retournez progressivement à une intensité complète.

• Écoutez votre corps et veillez à toujours garder une technique irréprochable.

• Pensez long terme! Ce n'est pas le moment de vouloir se prouver et soulever des charges irresponsables.

Soyez créatifs, écoutez votre corps et les praticiens de santé, mais surtout, appropriateurs le fait que vous contrôlez la situation et comment vous récupérez d'une blessure.